La marche jusqu’à l’infirmerie lui paraît durer une éternité. Dorcas se concentre comme jamais sur son sortilège, consciente de l’importance de sa tâche. La vie de sept élèves de sa maison pourrait en dépendre. Elle ne lance pas le moindre regard vers les élèves présents dans le parc et dans le château, et personne n’ose la déranger. Finalement, elle arriva enfin devant l’infirmerie, et Hélios se précipita sur la porte pour lui ouvrir et lui permettre une entrée facile. Dorcas tente alors de faire entrer un à un les joueurs par la porte, et confiante en ce qu’elle a lu dans un livre sur la magie sans baguette, elle utilise sa main gauche pour diviser son sortilège et assurer une meilleure direction aux joueurs. Emerveillée par ce qu’elle arrive à faire, elle fait finalement rentrer le dernier joueur avant de passer la porte à son tour, tandis que l’infirmière sortait en courant de son bureau. « Mais qu’est-ce qu’il s’est passé ? Dépêchez-vous, ils ont l’air mal en point ! » Mais Dorcas ne répond pas, incapable d’ouvrir la bouche pour faire autre chose que rendre son déjeuner. A la demande de l’infirmière, elle pose délicatement les élèves de Gryffondor sur les lits de l’infirmerie, fuyant à présent le visage de James, qu’elle ne supporte pas de voir dans un tel état. Elle observe le visage de l’infirmière qui se penche aussitôt vers le joueur le plus proche, anxieuse, et Dorcas doit se battre contre sa pulsion de crier à l’infirmière de s’occuper d’abord de James. Lily semble éprouver la même envie, sans oser approcher, attendant le verdict de l’infirmière avec la même appréhension. C’est finalement Hélios qui rompit le silence, répondant enfin à la question de l’infirmière. « On-on a voulu leur faire une blague. Du-du gaz étrangleur. » Dorcas relève la tête pour regarder les deux jeunes Serpentard, outrée. C’était donc l’idée qu’ils se faisaient d’une blague ? Elle espérait bien pouvoir témoigner pour les faire renvoyer tous les deux. L’infirmière quitta alors la pièce, revenant quelques instants plus tard avec plusieurs fioles dans les mains. Elle les vida une à une dans les bouches des Gryffondor, et Dorcas vit avec soulagement un souffle soulever la poitrine de James, légèrement, mais assurant à Dorcas qu’il était toujours en vie. « Ils s’en remettront, mais vous devrez vous expliquer aux professeurs McGonagall, Slughorn et Londubat. » Elle lança un regard sévère aux deux Serpentard, mais une fois soulagée par la nouvelle, Dorcas se tourna à son tour vers eux, sentant la fureur monter en elle. « Vous vous rendez compte de ce que vous auriez pu provoquer ? Vous auriez pu tous les tuer ! Vous ne réfléchissez donc jamais ? C’est un scandal, c’est honteux, un tel comportement ! Ton propre frère, Lily, comment as-tu pu ? Et toi.. » Mais avant que Dorcas n’ait le temps de dire quoi que ce soit sur ce qu’elle pensait de la conduite de Hélios, l’infirmière s’était tournée vers elle. « Silence ! C’est une infirmerie ici, jeune fille. Sortez, si vous tenez tant à crier. » Dorcas rougit légèrement, réalisant qu’elle avait parlé un peu trop fort pour le lieu où ils se trouvaient. Elle fit donc un signe à Hélios en lui indiquant la porte. Il devait payer.

Arrivée face à l’infirmerie, Lily sent son angoisse plus présente que jamais. Bientôt, ils allaient savoir. Bientôt, il n’y aurait peut-être plus d’espoir, et cette pensée lui était insupportable. L’envie de fuir loin de cette infirmerie la pris soudain, mais elle se le refusa. Elle devait savoir, et puis, tout était de sa faute, elle n’avait pas le droit de le laisser seul maintenant qu’elle l’avait peut-être.. Non, elle ne voulait pas formuler cette idée, c’était impossible. Lily regarda avec inquiétude Dorcas poser les membres de l’équipe, mais elle fut un peu rassurée de voir que la préfète faisait attention à ce qu’ils ne soient pas blessés d’avantage. Les dernières secondes avant de savoir étaient les pires. Lily entendait vaguement Hélios dire quelque chose, mais elle n’entendit pas quoi. Elle était trop concentrée à essayer d’interpréter les gestes de l’infirmière, la peur lui nouant l’estomac tandis que l’infirmière grimaçait, secouant la tête. Les larmes redoublèrent sur ses joues, elle qui ne pleurait normalement jamais, et elle se mis à ronger ses ongles plus que jamais, persuadée que cela pourrait aider. L’infirmière repartit avant de revenir avec des fioles, qu’elle força les joueurs à boire. Aussitôt, un souffle fut légèrement visible, et Lily poussa un long soupire de soulagement, s’écroulant sur une chaise derrière elle sous le coup de la tension qui retombait. « Ils s’en remettront, mais vous devrez vous expliquer aux professeurs McGonagall, Slughorn et Londubat. » C’était comme si ses oreilles s’étaient soudain débloquées. Ils seraient peut-être renvoyés, ils le mériteraient, mais elle s’en moquait à présent, elle était trop soulagée pour s’en faire pour sa punition. Et puis, Dorcas s’était mise à hurler, et la culpabilité avait fait son nid à la place de l’angoisse, lui faisait réaliser ce qu’elle avait fait. C’était elle plus qu’Hélios qui avait agi. Dorcas avait totalement raison de leur en vouloir. Heureusement, l’infirmière demanda à Dorcas de sortir si elle voulait hurler, et celle-ci sortie avec Hélios, au grand étonnement de Lily. Pourquoi était-elle épargnée par les remontrances de Dorcas ? C’était étrange qu’elle ne désir disputer que Hélios, alors qu’elle semblait tant vouloir se rapprocher de son petit frère depuis l’incident de la semaine dernière. L’infirmière continuait à s’affairer autour des Gryffondor, et Lily ne pouvait s’empêcher de se sentir de trop dans la pièce, comme si elle n’avait pas le droit d’être là, autour de ses victimes. Elle ne put cependant s’empêcher de s’approcher de James, qui lui faisait beaucoup moins peur à présent qu’elle était sûre de ne pas l’avoir tué. C’est alors que des éclats de voix provenants de dehors attirèrent son attention. Se retournant, elle décida d’aller entre-ouvrir la porte, juste pour être sûre que tout allait bien dehors.

Après avoir désigné la porte à Hélios d’un simple signe de tête, Dorcas l’ouvrit maladroitement, la main toujours légèrement tremblante. Une fois son frère sortit, elle referma la porte avant de faire quelques pas pour s’en éloigner, inutile de rester trop près, cela risquerait d’attirer l’attention de l’infirmière et de Lily. Elle posa sur Hélios un regard sévère, consciente de la terreur qu’il devait éprouver face à elle depuis leur petit.. entretien de la semaine passée. « Tu sais, je-j’ai cru que ça te ferait plaisir. Je… je ne pensais pas que ça allait se passer comme ça. » Il baissa la tête, craignant la sanction, tandis que Dorcas accusait le coup. S’il avait vraiment agi pour lui faire plaisir.. Mais non, elle ne pouvait être tenue responsable de la stupidité de son petit frère. Elle n’était en rien responsable de l’incident qui avait eu lieu. « C’est du gaz étrangleur, Hélios ! Qu’est-ce que tu pensais que ça serait, à part étrangler les gens ?! Tu pensais qu’ils n’avaient pas besoin d’air pour respirer ? Tu es vraiment aussi idiot que cela ?! J’espère que tu seras renvoyé, tu es une honte pour notre famille, une honte ! J’écrirais à maman, et tu auras de la chance si es encore autorisé à aller à Pré-au-Lard et à jouer au Quidditch ! Tu veux aller rejoindre papa à Azkaban ? Parce que c’est ce qui serait arrivé si je ne t’avais pas sauvé la mise ! Après tout le mal que je me suis donnée pour réhabiliter notre nom ! » Si les actions de cet abruti se répercutaient sur elle, il pouvait être sûr de quitter Poudlard prochainement entre quatre planches. Si le moindre soupçon s’abattait sur elle, elle était fichue. Elle n’avait pas le droit à une seconde chance. Tout le monde considérait déjà qu’en naissant Avery, elle avait usé une première chance. Pour tous, l’accepter, c’était lui donner une deuxième chance, elle n’avait pas le droit à l’erreur. Elle se pencha alors vers Hélios, baissant la voix. « Papa va bientôt sortir d’Azkaban, Hélios, j’ai reçu une lettre de maman ce matin pour me l’annoncer. Et tu peux être sûr que si tu recommences ce genre de connerie, sa punition sera bien pire que notre petit entretien de jeudi dernier. » Elle lui ébouriffa les cheveux dans un faux geste d’affection avant de faire demi-tour, le laissant sans voix face à toutes ces informations. Quant à elle, elle repassa devant l’infirmerie, cherchant un couloir désert où elle s’écroula, se roulant en boule pour pleurer.

Lily se colla à la porte qu’elle entre-ouvrit légèrement afin d’entendre ce qu’il se passait à l’extérieur sans être vue. Elle s’en voulait d’avoir abandonné la cape d’invisibilité de son père au terrain de Quidditch car habituellement, elle s’arrangeait toujours pour l’avoir en permanence sur elle - au cas où. Toutefois, les éclats de voix de Dorcas semblaient s’être tues, comme si elle avait terminé de laisser sortir toute sa colère contre Hélios, et indirectement contre Lily, bien qu’elle n’avait pas osé lui dire en face. Cependant, la Serpentard parvint malgré tout à percevoir une voix très faible. « Papa va bientôt sortir d’Azkaban, Hélios, j’ai reçu une lettre de maman ce matin pour me l’annoncer. Et tu peux être sûr que si tu recommences ce genre de connerie, sa punition sera bien pire que notre petit entretien de jeudi dernier. » L’angoisse lui revint en entendant cela, et elle s’empressa de refermer la porte et de s’en éloigner de quelques pas, retournant sur la chaise contre le mur, face aux lits de l’infirmerie, effarée par ce qu’elle venait d’entendre. Elle s’était lourdement trompée, elle s’était laissée abusée comme jamais auparavant. Et elle, elle avait cru Hélios quand il avait accusé James de l’avoir attaqué. Comment avait-elle pu croire que son frère soit capable d’une telle chose ? C’était elle, le monstre dans l’histoire, elle qui faisait du mal aux gens qu’elle aimait. Et Dorcas, la parfaite préfète en chef, si émouvante au chevet de son frère.. Comment pouvait-il la couvrir après cela ? Et Lily ne voulait même pas penser au fait qu’ils puissent relâcher d’Azkaban l’un des plus grands criminels de moldus de leur temps. Ces gens là n’apprennent jamais, et maintenant, les Avery seraient encore plus dangereux avec leur père derrière eux. Elle entendit la porte s’ouvrir à nouveau, mais elle ne tourna pas la tête. Elle ne voulait plus le voir, plus jamais. « Il va mieux ? » Lui demanda-t-il en désignant James. Cette fois, ce fut la colère qui s’empara de Lily. Comment osait-il parler de James, après tout ce qu’il lui avait fait subir ? « Eh Avery, tu t’inquiètes bien beaucoup pour celui qui t’a soi-disant agressé il y a une semaine.. » Elle avait parlé d’une voix froide qu’elle-même ne se connaissait pas, loin de la voix chaleureuse avec laquelle elle s’adressait habituellement à Hélios, l'appelant pour la première fois par son nom de famille, une famille qu'il avait toujours renié, à l'image de sa parfaite grande soeur. Elle lui avait fait confiance plus qu’à n’importe qui d’autre, choisissant de le croire face à sa propre famille, et voilà comment il la remerciait. Lily décida alors de laisser tomber le masque. L’infirmière était retournée dans son bureau, et l’équipe de Gryffondor était toujours inconsciente, et de toute façon, elle ne pouvait garder cela pour elle. « Je vais avoir beaucoup de choses à me faire pardonner, peut-être même qu’il ne me pardonnera jamais. Il y a le gaz étrangleur, bien sûr, mais surtout le fait de l’avoir stupidement accusé à tord d’avoir levé la main sur toi, quand tu me mentais effrontément pour protéger ta psychopathe de soeur. » Elle avait parlé de la même voix froide et monotone, ne relevant son regard flamboyant vers Hélios qu’à la toute fin pour observer sa réaction. Finalement, James avait eu raison depuis le début au sujet des Avery, et elle avait été trop sotte pour le comprendre, elle avait honteusement doutée de lui, et c’était bien le pire dans cette histoire, qui sait s’il lui pardonnerait un jour.

Incapable de le regarder plus longtemps, Lily avait rapidement détourné son regard après avoir vu ce qu’elle voulait voir. Il avait blêmi, comprenant qu’elle savait tout, et elle se repris dans la contemplation des lits face à elle, la culpabilité lui nouant l’estomac un peu plus à chaque minute. Qu’adviendrait-t-il de l’équipe de Serpentard ? Et s’ils étaient disqualifié à cause d’eux ? Peut-être les Gryffondor arriveraient-il à faire reculer le match, et les Serpentard affronteraient une autre équipe en attendant le rétablissement de leurs principaux rivaux. Lily vit du coin de l’oeil que Hélios se laissait tomber contre le mur à côté d’elle, jusqu’à atterrir au sol. Il lui rappelait de façon insupportable la scène de la semaine dernière, en dehors de cette même infirmerie, où c’était James qu’elle avait mis au sol par ses simples paroles. « Lily… Je-j’aurais voulu t’en parler. Mais je ne pouvais pas. Tu l’as dit toi-même, c’est une psychopathe. Tu as vu ce qu’elle m’a fait, l’autre jour ? Elle n’aurait pas hésité à me tuer si je ne disais pas que c’était James qui m’avait fait ça, comme elle le voulait. » Sa voix tremblante trahissait ses larmes, mais Lily n’arrivait plus à s’émouvoir pour lui. Il était son meilleur ami, et il l’avait trahi. Il aurait pu lui faire confiance, se confier à elle, ils auraient trouvé une solution, fait mettre Dorcas en prison, rejoignant son cinglé de père. D’ailleurs, pourquoi désirait-elle tant voir James accusé ? Il avait eu raison sur toute la ligne. Lui, il s’était confié à Lily au sujet de Dorcas, mais elle n’avait pas su écouter. « Elle aurait été capable de te tuer pour me faire du mal, si je n’avais pas fait ce qu’elle demandait. Et-et je me suis dit qu’il valait mieux que James soit expulsé, plutôt que quelqu’un se fasse tuer. » Le coeur de Lily se serra légèrement en entendant que Hélios avait agi pour la protéger elle de sa grande soeur. Elle essayait de se mettre à sa place un instant, aurait-elle était capable de faire croire à Hélios que sa soeur l’avait attaqué alors que c’était son propre frère qui l’avait fait, si cela pouvait protéger Hélios ? Probablement. Elle pouvait comprendre que l’on soit capable de tout pour protéger les gens que l’on aimait, après tout, elle-même avait protégé James en demandant à Hélios de se taire. « S’il te plait, n’en parle pas, on se ferait tuer sur le champ. Tu n’imagines même pas ce dont elle est capable. Et n’en parle pas à James, tu… tu le mettrais en danger. » Pourrait-elle vraiment cacher tout cela à son frère ? Il pourrait garder un oeil sur Dorcas, les aider à la surveiller. Ils pourraient la coincer, ensemble. Mais James tuerait probablement réellement Hélios s’il savait qu’il a menti pour le faire accuser, et même si Lily était furieuse contre Hélios, elle ne voulait pas qu’il se reprenne le genre de punition ‘à la Avery’. « Pourquoi voulait-elle faire accuser James ? A cause de notre père qui a mis le votre en prison ? Dans ce cas.. Pourquoi les a-t-elle sauvé ? Elle aurait pu prétendre être aussi paniquée que nous et les laisser mourir sans jamais être accusée de quoi que ce soit. » Elle n’arrivait décidément pas à cerner la préfète en chef. Son comportement n’avait aucun sens, aucune logique, il était impossible de savoir quel serait son prochain coup. Dorcas pouvait faire n’importe quoi, il lui serait facile de faire accuser quelqu’un d’autre, et qui mettrait en doute la parole de la préfète en chef parfaite ? Lily se tourna à nouveau vers Hélios. « J’accepte de me taire, de ne rien dire à James, mais seulement pour l’instant. Tu dois trouver une solution pour l’arrêter, et prétendre auprès d’elle que tu es de son côté pour savoir ce qu’elle prépare et pouvoir empêcher d’autres personnes d’être blessés. Si tu ne le fais pas, j’irai directement voir McGonagall. » Si bien sûr elle était encore à Poudlard d’ici là. Elle vit alors trois furets argentés sortir du bureau de l’infirmière pour sortir à travers le mur. Elle avait déjà vu ce moyen de communication, l’infirmière venait sans aucun doute d’envoyer trois patronus, aux professeurs McGonagall, Londubat et Slughorn, appelés pour décider de leur sort.